Le Cameroun lance, le 31 mai 2024, la mise en œuvre de sa Stratégie nationale de développement du secteur financier (SNDSF), apprend-on d’un communiqué de presse publié par le ministre des Finances, Louis Paul Motaze (photo). Ce dernier préside le Comité national économique et financier du Cameroun (Cnef). Cet organisme consultatif en matière bancaire, monétaire et financière a élaboré, avec l’appui de la Banque mondiale et de l’Union européenne, la SNDSF et est chargé de sa mettre en œuvre sur une période s’étalant de 2024 à 2030.
Cette stratégie vise à doter le Cameroun d’une « place financière capable de soutenir la transformation structurelle de son économie ». Concrètement, il s’agit d’« améliorer la contribution du secteur financier à la croissance économique, au relèvement du niveau de vie des populations et à la promotion du développement de l’entrepreneuriat au Cameroun ». Selon le scénario le moins favorable, « la mise en œuvre de la SNDSF permettra d’obtenir un gain de croissance annuelle supplémentaire de 2,3% », soutient le Cnef. Elle devrait aussi, selon la même source, permettre de générer des recettes budgétaires additionnelles de 105 milliards de FCFA par an, soit 630 milliards de FCFA sur la période 2025-2030.
De ce fait, cette stratégie est présentée par ses initiateurs comme un « game-changer » en matière de croissance économique. En effet, si ses objectifs sont atteints, elle devrait remettre le Cameroun sur la trajectoire de l’émergence. Dans la perspective de devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, la Stratégie nationale de développement (SND30), lancée en juillet 2020, s’est fixée pour objectif d’atteindre une croissance moyenne de 8 % entre 2020 et 2030. Or, le taux de croissance du PIB est projeté à 4,3% en 2024. Il est estimé à moins de 4% en 2023, après 3,4% en 2022, 3,6% en 2021 et 0,5% en 2020. Avec une croissance annuelle supplémentaire de 2,3%, on devrait se rapprocher de la moyenne annuelle de 8%.
Plan d’actions
Pour y parvenir, la SNDSF prévoit des actions regroupées en six axes stratégiques. Il s’agit de renforcer la confiance, la stabilité et la résilience des institutions financières ; mieux exploiter les infrastructures en accélérant les plateformes financières ; améliorer le cadre réglementaire et libérer la concurrence dans les services financiers nationaux et autres services financiers innovants ; améliorer l’inclusion financière et l’accès au crédit des micro, petites et moyennes entreprises ; renforcer les institutions publiques de financement pour rendre l’intervention publique plus efficiente et soutenir le financement à long terme, vert et durable de l’économie.
Concrètement, il est par exemple prévu de restructurer le secteur des microfinances ; de mettre en place un système national de garantie des dépôts dans les microfinances ; d’étudier la faisabilité d’introduire la concurrence dans plusieurs parties de la gestion des infrastructures numériques de l’opérateur public des télécoms Camtel ; de lancer sans délai le bureau d’information sur le crédit ; de créer un observatoire des pratiques commerciales dans le secteur financier ; ou encore de mettre en place un centre de formation et de professionnalisation des cadres au service des banques et autres institutions financières du pays.
« La mise en œuvre de la SNDSF repose sur une gouvernance partenariale devant garantir son efficacité », indique le Cnef. Dans la pratique, un comité technique de pilotage, coordonné par le secrétariat général du Cnef, logé à la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), assure la mise en œuvre et le suivi de la stratégie. Elle s’appuiera sur six groupes de travail dédiés à chaque axe stratégique. Le tout est chapeauté par un comité de pilotage présidé par le ministre des Finances. Deux évaluations (en 2027 et 2030) sont par ailleurs prévues.
La SNDSF vise à corriger les faiblesses révélées par l’analyse diagnostique du secteur, menée en 2022, qui constituent des entraves à la contribution optimale du secteur financier à la création de richesses. Il s’agit du manque de profondeur du secteur, de la difficulté d’accès des micro et PME au financement, du faible accès au financement de long terme, des manquements dans la réglementation et de la faiblesse de l’innovation financière.
Aboudi Ottou