un journaliste rend hommage au célèbre commerçant « Douala pas cher»

Dans un récent texte, Célestin Biaké Difana, journaliste éditorialiste rend hommage à  Feumi Fidèle, célèbre commerçant et grand frère de  Séverin Tchounkeu, le promoteur d’Equinoxe Tv et Radio.

Lire ici son texte :

FEUMI FIDÈLE, L’ANGE GARDIEN

Il promenait sur le monde cet air d’éternel étonné qui semblait ne pas revenir de pas mal de choses. Et pourtant, quel curieux éveillé mais aussi quel observateur froid ! Feumi Fidèle au-delà du commerçant qu’il était, était en fin de compte un cérébral caché. Il avait l’intelligence des choses subtiles et l’art de percevoir avant tout le monde, les pièges et entourloupes qui pouvaient se cacher derrière les apparences. Une qualité rare que d’aucuns  mieux que la lucidité, appellent flair. Ce qui lui a valu beaucoup de succès autant qu’à ceux qui pouvaient graviter autour de lui et prendre la patience de l’écouter.

 C’était à mes débuts dans le journalisme, un mentor (si, si il me suggérait des sujets d’analyse et de réflexion) et un protecteur. Même au plus fort de notre crise de croissance de l’été 1994 à la Nouvelle Expression, il n’a lésiné sur rien pour me faire revenir à des sentiments plus que conciliateurs. Quand j’arrive à la Nouvelle Expression en mars 1992, c’est juste un canard qui se fraye difficilement un chemin vers la reconnaissance, cerné qu’il est par le Messager de N’jawe au sommet de la gloire et Challenge hebdo du truculent B. Zebaze, un ex promotionnaire de la Faculté de Droit de 1982/83 et dont nous avons partagé si je crois bien me souvenir, le même groupe de TD dans les poulaillers de Ngoa-Ekelle.

En brisant les codes, Zebaze avec ses Editions Saint-François, avait réussi une percée fulgurante dans le monde de la presse écrite avec des janissaires de la plume et du crayon tels Ebolé Bola, Pauline Poinsier, Nicolas Tedjoumessie, Pierre Marie Pone, J. P Kengne et j’en oublie. C’était trop beau pour ma génération et c’est l’esprit libre des cop’s de Ngoa-Ekelle qui suintait ainsi dans la presse. Le mouvement, après la déroute de Cap-Liberté et le souvenir douloureux de mon embastillement en 1987 sur les contreforts d’Americanos à l’ancienne Garde Présidentielle d’Ekounou, m’appelait.

Dégoûté et démissionnaire de la Socar, je traîne mes guêtres autour de Challenge Hebdo pour finir par atterrir à la Nouvelle Expression qui en est à sa 37è ou 38ème édition je crois. C’est une maison qui se cherche. Ma compagne de l’époque la belle Ngo Pembha m’y encourage fermement. Jacques Blaise Mvie m’accueille avec beaucoup d’amour. Il faut dire que c’est un grand frère que j’avais perdu de vue depuis des lustres. Il m’a tenu la main à l’école Sacré-cœur de New-Bell et était l’ami de Nyamsi Roger mon grand cousin parti trop tôt. Après un petit reportage, je me signale avec une puissante analyse d’après législatives de 1992 : « Assemblée nationale y a-t-il lieu d’espérer »?

 J’ouvre en cette occurrence des pistes de réflexion sur les alliances possibles tout en attirant l’attention sur la théorie de l’apparentement qui pourrait dans un contexte de défiance forte au sein de l’opposition, survenir. Et le MDR de Dakolé a sauté ce pas là, brisant la dynamique du changement. L’article du reste sera signé du pseudonyme J.D Sibafo. Je suis nouveau et on me frustre.

Qu’importe, le ton est donné et des conseillers de la maison me prennent en sympathie. Séverin Tchounkeu d’abord qui plus tard me fera la pleine confiance de la représentation du journal dans les débats de la CRTV et l’organisation des « Clubs de la Presse », Rokeni Tamze, J.M Kemajou, Alphonse Soh, et plus subtilement Feumi par la suite. En creusant on se trouve des liens de famille. Il m’ouvre sa boutique et sa sympathie, m’offre à mon prix à moi, fringues et chaussures sans manquer  de m’entourer de ses prévenances. Notre fronde professionnelle lui a fait mal. Pour autant, il ne m’a aucunement retiré son amour. Sur son chemin des dimanches quand il avait encore la possibilité de marcher pour se rendre à la cathédrale Saint Pierre et Paul de Douala depuis son hôtel Mata Palace sur le Boulevard de la Liberté, nous nous croisions et échangions un bon bout avec nostalgie.

D’apprendre sa mort m’a sorti des larmes des yeux parce que tant de simplicité, de bonté, de disponibilité et d’humilité pour un si riche magnat caché, sont des surprises fortes de la vie. Les Cacharel Djantou, Nya Créneau, sa grande famille, et une ribambelle de jeunes qui ont fait fortune par son entremise sont à coup sûr en ces moments fortement retournés.

VA EN PAIX GRAND FRÈRE, C’EST TONGA QUI PERD UNE LUMIÈRE.