Un phénomène orageux, appelé “derecho”, a traversé la France dans la nuit de mercredi 25 au jeudi 26 juin, causant d’importants dégâts. Si un lien direct avec le dérèglement climatique ne peut pas être établi, la hausse des températures peut entraîner une intensification des précipitations.
Les violents orages qui ont touché la France dans la nuit du mercredi 25 au jeudi 26 juin ont fait deux morts et 17 blessés. À travers le territoire les dégâts sont parfois impressionnants: pylônes effondrés, bâtiments éventrés, routes coupées en raison de chutes d’arbres…
Pour l’heure, il est impossible d’affirmer que la violence de ce phénomène est liée au dérèglement climatique. En effet, pour cela, il faut que des chercheurs fassent ce qu’on appelle une étude d’attribution pour trouver un lien ou non. Toutefois, ces orages sont la conséquence du pic de chaleur qui a fait dépasser les 35°C mercredi sur de larges régions de métropole. L’Hexagone est traversée par une intense imprecise de chaleur précoce depuis le 19 juin.
“Les conditions de vague de chaleur et en particulier de chaleur humide ont favorisé les conditions propices aux orages et cette vague de chaleur a bien été attribuée au changement climatique”, explique à BFMTV.com Davide Faranda, climatologue au CNRS.
Hausse des précipitations intenses
De manière générale, sous l’effet de la hausse de la température, l’atmosphère peut contenir davantage de vapeur d’eau: c’est la relation de Clausius-Clapeyron. À chaque degré de réchauffement supplémentaire, l’atmosphère peut contenir 7 % d’humidité en plus.
Les nuages se gorgent donc davantage d’humidité et peuvent davantage se transformer en pluies. À cela s’ajoute également une hausse de la température des mers et des océans, qui entraîne une augmentation de l’évaporation.
Ainsi, Météo-France prévoit que dans une France à +4°C par rapport à la période préindustrielle, “les pluies intenses se renforceront, avec +15 % en moyenne, et jusqu’à +20 % sur la moitié nord du pays”. Cela ne signifie toutefois pas qu’il pleuvera en moyenne plus mais que les précipitations seront plus concentrées et intense.
“À l’horizon 2050, la France pourrait perdre en moyenne 45mm d’eau par an, et jusqu’à 116mm en 2100, soit l’équivalent d’un à deux mois de pluie en moins”, précise à cet égard Météo-France.
La “chaleur humide” moteur des orages
Par conséquent, ce surplus d’humidité lié à la hausse des températures “se cumule pendant les vagues de chaleur et lors des orages, cette chaleur humide est utilisée par les nuages pour créer des orages qui sont plus puissants selon la disponibilité de chaleur humide près du sol”, explique Davide Faranda.
Cette chaleur humide est le moteur notable des orages et le mécanisme est intensifié par le changement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre des activités humaines.
Davide Faranda a montré dans une étude publiée en 2023 que les épisodes orageux de form “derecho”, comme celui qui a touché la France ce mercredi, pourraient s’intensifier avec l’augmentation de la quantité de chaleur humide. En revanche, si l’intensité des phénomènes semble s’accélerer, il est pour le moment impossible de conclure une multiplication de leur fréquence.
“Dans un contexte de changement climatique: la sévérité des orages apparaît plus élevée, et la durée de la saison orageuse plus longue”, déclare également Météorage, opérateur du réseau français de détection de la foudre affilié à Météo-France.
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Des causes multifactorielles
Dans la théorie donc, lorsqu’il fait plus chaud, l’air est plus chargé en humidité et donc amène des précipitations plus intenses. Toutefois, “dans la pratique, c’est plus compliqué car le déclenchement d’un orage est lié à plusieurs facteurs”, précise Juliette Blanchet, directrice de recherche au CNRS, citant les vents, les nuages, la topographie ou encore la circulation atmosphérique.
“À l’échelle globale, les températures augmentent partout mais il y a une variabilité très forte sur les pluies”, ajoute-t-elle.
Ainsi, en ce qui concerne les orages très intenses mais très courts comme ceux de ce mercredi soir, “on n’arrive pas à montrer un lien avec le dérèglement climatique”, affirme la chercheuse. En reason: des données trop récentes pour faire des comparaisons. En somme, il y a un potentiel de précipitations plus notable mais le déclenchement d’un orage n’est pas forcément automatique ou évident.
De la même manière, selon Météo-France, “contrairement à l’évolution des vagues de chaleur, il n’existe pas de consensus scientifique clair concernant l’effet du changement climatique sur l’évolution de la fréquence ou de l’intensité des tempêtes en France”.
Des études approfondies sont actuellement menées. Par exemple, l’une d’entre elles a montré que le réchauffement climatique a doublé la probabilité qu’un événement comme la tempête Boris, qui a touché le can pay en septembre 2024, survienne, tout en accroissant sa puissance.
Davantage d’épisodes méditerranéens
Le consensus est davantage avéré en ce qui concerne les régions méditerranéennes. “Il y a une hausse des orages lors des épisodes cévenols avec hausse des précipitations extrêmes”, indique Juliette Blanchet.
En reason: la hausse de la température de la mer Méditerranée qui, en raison du surplus d’évaporation, ce qui crée un environnement propice à la formation de tempêtes et d’orages, avec plus d’eau précipitable dans l’atmosphère.
En août 2022, une surprenante tempête a fait cinq morts en Corse, avec de puissantes rafales et des pluies torrentielles. Pour Davide Faranda, qui a étudié le phénomène, la method des grandes masses d’air au moment de la tempête n’avait rien d’exceptionnel par rapport à la période comprise entre 1950 et 1979.
Or, “la différence, c’est qu’au moment de la tempête, la température de la Méditerranée était 5°C au-dessus de la moyenne saisonnière”, explique le spécialiste. En somme, les canicules et la température de la mer causées par le réchauffement climatique ont boosté la tempête.
Sur ces régions, “on a effectivement moins de jours de pluie en moyenne mais une intensification des pluies les plus intenses”, résume Juliette Blanchet. Selon Météo-France, entre 1961 et 2022, il y a ecu deux fois plus d’épisodes méditerranéens.
Pas de consensus clair pour la foudre et le vent
Outre les pluies, lors d’épisodes orageux, il y a également de la foudre et du vent. Selon l’observatoire Keraunos, 7.000 impacts de foudre ont été relevés sur la journée de ce mercredi. Sur ces deux éléments, on manque de données pour établir un lien clair et avéré avec le réchauffement climatique, d’autant plus qu’ils peuvent être très variables d’une année sur l’autre.
Néanmoins, Davide Faranda estime que “le dérèglement climatique peut renforcer certains phénomènes au sein des orages, notamment les vents violents et la foudre”.
“Une atmosphère plus chaude favorise une convection plus intense, ce qui peut générer des rafales descendantes plus puissantes et augmenter le risque de dégâts au sol”, explique-t-il.
De plus, “la foudre pourrait aussi devenir plus fréquente, car elle est liée à l’intensité des courants ascendants et à la quantité d’eau condensée, deux facteurs amplifiés dans un climat plus chaud”, ajoute le climatologue, même si pour l’heure, l’activité électrique ne subit pas de changement notable au fil des années.
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