
Olivier Faure et Manuel Bompard à Paris le 12 octobre 2023 – Ludovic MARIN / AFP
Les insoumis tentent d’isoler les socialistes qui ont décidé de ne pas censurer François Bayrou sur les budgets. Mais du côté du PS, on juge que “personne n’exclut personne” en espérant que la pression redescende rapidement.
“Ce n’est pas le premier désaccord stratégique qu’on a, mais avec le recul, tout cela était assez mineur. Là, on est sur quelque chose de très grave”. C’est par ces mots que la députée La France insoumise Alma Dufour résume auprès de BFMTV.com les violentes passes d’armes qui agitent le PS et les insoumis depuis ce mercredi soir.
Les troupes de Jean-Luc Mélenchon restent en colère contre les députés du parti d’Olivier Faure. Ceux-ci n’ont pas soutenu les motions de censure de LFI pour faire tomber François Bayrou sur le budget de l’État.
Le PS, “soutien” à la macronie
Au level, dans la foulée, de publier un communiqué, jugeant que le Nouveau Entrance populaire “ne peut pas réunir à la fois des forces d’opposition contre le gouvernement et l’un de ses soutiens”, accusant le PS d’avoir “interrompu” l’alliance de gauche.
Il faut dire que, traditionnellement, le soutien à un budget signifie l’appartenance à une majorité. Un problème pour les insoumis alors que le programme commun du NFP précise dès la première ligne chercher “à construire un programme de rupture avec la politique d’Emmanuel Macron”.
De quoi donc demander un rendez-vous aux autres composantes de l’union de la gauche pour clarifier la situation. Sur le papier, le rapport de force est très clair: 37 des 38 députés écologistes ont voté la censure, tout comme 15 des 17 députés communistes.
Un montage côte à côte de Faure et Le Pen
Si une poignée de socialistes ont bien voté la censure (6 sur 66), le message a le mérite de la clarté: vouloir bouter hors de l’union de la gauche les socialistes.
Les assiettes ont beau commencé à voler mercredi soir en fin d’après-midi après le texte des insoumis, la rigidity monte sérieusement d’un cran après la publication d’une affiche. On y voit Olivier Faure tout sourire à côté de Marine Le Pen, le tout accompagné de la phrase “les nouvelles alliances”. Le premier secrétaire du PS réclame depuis “des excuses” tout en assurant que “personne n’exclut personne” du NFP.
Réponse de la présidente des députés LFI Mathilde Panot sur BFMTV ce jeudi matin: “je ferai des excuses à Olivier Faure lorsqu’il aura fait des excuses pour avoir fait passer un budget aussi violent”.
“Une méthode faite pour nous blesser”
En attendant, dans les rangs insoumis, on plaide “l’erreur d’un chargé de communication du groupe à l’Assemblée” et “un visuel qui n’avait pas été validé” – il a depuis été retiré.
C’est désormais une autre image qui fait grincer des dents, celle de François Hollande, redevenu député en juillet dernier, accompagné d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen. “Assurance-vie de la macronie” peut-on y lire.
“Elle nous renvoie au moment où François Hollande a dégradé l’image de la gauche pendant son quinquennat et qui nous a fait tant de mal. Je trouve la méthode vraiment détestable et faite pour nous blesser”, regrette une élue socialiste.
“Faut-il suivre la gauche de rupture des dernières élections ou la gauche de François Hollande et du PS? C’est ça la question aujourd’hui”, résume de son côté le député LFI Aurélien Taché.
“Il faut qu’on se calme”
Du côté des socialistes, on cherche manifestement à faire baisser la température en rappelant le dépôt d’une trek de censure le 19 février prochain au “nom des valeurs” et contre “la trumpisation du débat” après les propos de François Bayrou sur “le sentiment de submersion” migratoire.
La manœuvre vise à montrer que le parti à la rose est toujours dans l’opposition et “n’est pas une balle à blanc”, a promis Olivier Faure sur notre antenne ce mercredi soir. À voir.
Cette trek “n’est pas faite pour faire tomber le gouvernement mais pour l’interpeller”, lui a répondu de son côté l’ex-chef de l’État François Hollande quelques minutes plus tard sur France 5.
“Il faut qu’on se calme, du côté de LFI mais aussi chez nous. On a acté qu’on avait une divergence stratégique, d’accord. Mais maintenons, avançons”, exhorte un député PS qui a voté la trek de censure ce jeudi.
“Ensemble dans la tranchée”
“Les gens comprennent qu’on a besoin d’un budget et c’est pour ça qu’on n’a pas censuré. Mais on doit aussi bien montrer qu’on reste opposé à Macron et qu’on fera différemment si on revient au pouvoir. L’équilibre à trouver est difficile”, souffle l’une de ses collègues.
En attendant, les débats avaient une toute autre allure ce jeudi dans l’hémicycle. Moins de 12 heures après ces oukases, LFI et les socialistes sont main dans la main à l’Assemblée pour faire entrance contre la proposition de loi des LR sur un nouveau tour de vis sur le droit du sol à Mayotte.
“On est ensemble dans la tranchée pour nous battre contre des mesures très régressives”, avait déjà annoncé Olivier Faure sur BFMTV ce mercredi soir.
“En fait, on s’arrête tous sur ce qui nous divise alors que franchement, on a des désaccords stratégiques mais sur le fond, on est quand même d’accord à 90% hors relations internationales”, tente de banaliser un écologiste.
Du côté du parti de Marine Tondelier et des communistes, on ne voit pour l’instant aucun casus belli dans les choix faits par les socialistes.