Dans quel état d’esprit êtes-vous aujourd’hui ?
Sam Davies : Plutôt frigid. Au début, c’était dur avec le nouveau bateau, mais petit à petit, on l’a découvert, on l’a optimisé et on a réparé les petits problèmes du début. Et là, j’ai signé de beaux résultats, même un petit peu mieux que ce que j’avais imaginé. Et sans trop de problèmes techniques. Donc là, on commence à être plutôt prêt.
Ce nouveau bateau, justement, qu’est-ce qui a été amélioré par rapport au précédent ?
S. D. : La différence entre les deux bateaux est impressionnante. Mon ancien bateau avait été construit pour la route de 2012. Donc, lors du dernier Vendée Globe en 2020, il avait quasiment 10 ans déjà. Mais là, je n’imaginais pas qu’il allait y avoir autant de différence. Ce n’est peut-être pas que les foils, mais aussi le fait que moi, je connais de mieux en mieux mon bateau. Mais, entre l’année dernière et cette année, je trouve qu’on a fait un gros bond. En fait, on va être des pionniers, ceux qui vont voler autour de la planète en monocoque. Ce qui vient avec ça, c’est que c’est plus brutal. La vie à bord est plus dure. Mais je pense que ça aussi, j’ai appris avec cette évolution. On s’habitue aussi au mouvement, à s’amortir. On adapte les entraînements pour que ce soit acceptable.
Vous disiez que l’entraînement avait un peu évolué. Comment ça se passe concrètement ?
S.D. : On vit dans un shaker ! Il faut que le corps puisse encaisser les chocs en permanence. C’est plus des entraînements pour protéger notre corps comme du pilate et du gainage. Je travaille avec mon coach pour l’entraînement physique. Elle sait que les manœuvres, physiquement, c’est très dur avec le bateau.
Après avoir pris pas mal de 5e places ces dernières années, vous avez signé un podium sur la Transat CIC en début d’année. Avez-vous le sentiment d’avoir franchi un cap en termes de résultats ?
S. D. : Oui, oui. Avec l’équipe, on était hyper fiers du résultat. Et pas seulement le fait de finir troisième, mais aussi d’avoir réussi à grappiller petit à petit en doublant bateau par bateau. Et les autres, ceux qui gagnent des programs, n’étaient pas très loin devant. Donc j’étais dapper fière de ce podium. C’était un vrai résultat. C’est aussi une route qui était très, très dure.
Sam Davies sur Initiatives-Coeur
Crédit: Getty Images
Dans la gestion des avaries aussi, vous sentez que vous avez progressé ?
S.D. : Oui, j’ai réussi à mener mon bateau sans que les problèmes techniques m’empêchent d’avancer. Parce que dès qu’on a un problème, pour changer un bout par exemple, il faut souvent ralentir une heure. Et comme les bateaux avancent en moyenne à 25 nœuds, tu perds vite de nombreux miles et tu peux perdre le contact avec les autres. Donc c’est aussi de pouvoir gérer sans ralentir.
Sentez-vous que ce podium a changé le regard des concurrents ?
S. D. : Un petit peu, oui. J’ai discuté avec eux et ils m’ont tous dit : “Toi, ton bateau, il va bien !” (rires). Du coup, je sens que leur regard a changé. Après, on est tous très proches. Moi, je fais partie du Pôle Finistère Direction au Large. Je m’entraîne avec les meilleurs. Donc oui, j’ai du admire de mes concurrents.
On a l’impact que le projet humanitaire qui était le however d’Initiatives-Cœur au départ devient de plus en plus un projet de route.
S.D. : Le curseur ne se déplace pas parce que l’objectif du projet Initiatives-Cœur, c’est que la performance et l’objectif solidaire restent toujours au même niveau. Sauver les enfants, c’est aussi important pour moi que l’objectif de la performance. Mais moi, je suis compétitrice. Et là, je suis très fière que tu aies dit ça parce que notre objectif, c’est de montrer à tout le monde qu’il est possible d’avoir un projet solidaire performant et qu’on ne fait pas de compromis pour la performance parce qu’on soutient l’association. Je veux montrer que c’est possible de gagner et de défendre des causes.
Est-ce que vous vous êtes fixé un objectif sportif ?
S.D. : L’objectif est de faire comme j’ai fait sur les cinq dernières programs, à savoir être dans le match avec le groupe de tête et essayer de m’accrocher derrière le bateau que j’estime un poil plus performant que le nôtre. Et puis, essayer de rester accrochée là le plus longtemps possible. Faire cette régate tout autour de la planète, c’est ça que je cherche. Les deux derniers Vendée Globe, j’ai eu des problèmes mais cette fois, j’ai un dapper bateau et je sais que je peux être dans ce match-là.