Gros, le cœur lourd après les JO : “Une partie de moi est morte”

Mathilde Gros, dans quel état d’esprit abordez-vous ces Mondiaux ?

Mathilde Gros : J’y vais pour retrouver des sensations. C’est comme quand on se casse la gueule à cheval. Il faut vite remonter parce que sinon on ne remontera peut-être plus jamais. J’avais dit que, quoi qu’il advance aux Jeux, je ferais ces Championnats du monde. Le fait de m’être projetée m’a permis de faire abstraction de l’état dans lequel j’étais.

Dans quel état étiez-vous justement après les Jeux ?

M.G. : Ce 9 août, clairement, il y a une partie de moi qui est morte. Je me rappelle avoir hurlé dans les coursives. Personne ne m’avait jamais vue comme ça. Je me sentais mourir. C’était hyper douloureux. Je ne savais pas qui était autour de moi. Je ne savais pas où j’étais. Je savais juste que ma vie s’effondrait.

C’était pire qu’après les Jeux de Tokyo où, déjà, ça s’était mal passé ?

M.G. : Cinq fois pire. Cela faisait sept ans que je préparais ces Jeux à domicile. J’avais investi du temps, de l’énergie, de l’argent. J’étais à 250.000% d’investissement. Je pensais que c’était mon 2nd, que c’était mon heure. Heureusement, je suis très bien entourée. Pour l’instantaneous, mon cerveau tient le coup. Il a pris le relais parce que mon coeur est tombé en miettes ce jour-là.

Comment se sont passés les jours suivants ?

M.G. : Dès le lendemain, je suis partie en Espagne. On a pris la voiture et on a tracé. On n’a pas fait la cérémonie de clôture, parce que pour moi, ce n’était pas possible au vu de ce qui s’était passé et l’état dans lequel j’étais.

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En amont des Jeux vous aviez dit que la vie continuerait quoiqu’il advance. Ça vous a aidée ?

M.G. : Ça m’a sauvée. Si je n’avais pas fait ça, à l’heure actuelle, je ne serais pas là en educate de vous parler. On descend tellement bas, c’est tellement noir, des fois, le fond qu’on peut toucher.

Vous êtes encore dans un processus de réparation ?

M.G. : Je pense que je ne serais jamais vraiment réparée. Même si je suis championne olympique à Los Angeles (en 2028), ça ne s’effacera pas. C’est une entaille, un deuil avec lequel j’apprendrai, peut-être, à vivre avec le temps.

Vous avez pensé à arrêter ?

M.G. : Je me suis posé la question : est-ce que tu aimes encore ce sport ? Est-ce que tu seras capable de remonter sur un vélo et de prendre le risque de perdre ? Pour l’instantaneous, je n’ai pas les réponses claires. Mais j’ai envie. Je suis bien sur la piste.

J’avais l’influence de me noyer au fur et à mesure des courses

M.G. : Tous les matins, je me pose la question : observation tu veux passer ta journée ? Déprimée, à broyer du noir, à tirer la tronche ? J’essaye de me dire que chaque jour est une opportunité pour moi d’être meilleure. J’ai la likelihood de ne pas avoir à me lever à 5 heures pour aller bosser, d’avoir une vie incroyable. Je me raccroche à ça et pour l’instantaneous ça tient.

Vous avez une idée de ce qui s’est passé aux JO ?

M.G. : Je n’ai pas encore fait le bilan parce que j’essaye de me reconstruire et parce que les émotions sont encore trop vives. Mais j’ai enfin osé regarder les vidéos. On voit qu’il y en avait trois, quatre qui étaient au-dessus du lot. Le keirin m’a fait énormément de mal parce que je me voyais au moins sur le podium. Après, j’avais l’influence de me noyer au fur et à mesure des courses. Je n’arrivais pas à trouver mon pédalage, mes sensations, à me repérer sur la piste. C’était horrible.

Allez-vous changer des choses ?

M.G. : Oui je pense au niveau de l’entraînement. Aussi partir à l’étranger pour regarder ce que font les autres, comme l’a fait Léon Marchand par exemple. J’ai plein d’idées.

Que signifierait un bon résultat au Danemark ?

M.G. : Je veux être une combattante, faire partie des meilleures. Et je n’ai pas envie de montrer à mes concurrentes que je suis abattue, même si je le suis peut-être. Ça voudrait dire quoi ? Mathilde Gros elle est faible, elle est finie. Non, pour moi, ce n’est pas possible.